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Découvrir l’architecture brutaliste de Montréal
Le brutalisme a joué un rôle charnière dans la fabrication de l’image de Montréal pendant la deuxième moitié du 20e siècle. À partir de l’après-Deuxième Guerre mondiale, ce style architectural qui met l’accent sur les matériaux bruts comme le béton nu et les formes géométriques inusitées a pris une place importante dans la phase d’industrialisation de Montréal, qui souhaitait embrasser les principes du modernisme des années 60 et 70. La métropole désirait ainsi montrer un visage innovant tout en s’éloignant d’un design plus traditionnel.
Aujourd’hui, Montréal compte donc sur une collection impressionnante de constructions brutalistes qui s’élèvent comme des témoins de cette période influente. Ces bâtiments, qui se caractérisent par leurs formes imposantes et leurs matériaux utilitaires, permettent un coup d’œil unique sur l’évolution architecturale de la ville.
Les incontournables
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RESO (Ville souterraine)
La Ville souterraine de Montréal, officiellement connue sous le nom RESO, est un réseau de 33 km de tunnels qui s’étirent sous la ville. C’est un exemple probant de brutalisme en matière d’infrastructure urbaine. Le RESO relie des centres commerciaux, des hôtels, des musées, des universités et des stations de métro, ce qui facilite le déplacement au centre-ville, surtout lorsque les conditions météorologiques sont… brutales.
Habitat 67
Conçu par l’architecte Moshe Safdie pour l’Exposition universelle de 1967 (Expo 67), Habitat 67 est un complexe résidentiel pionnier qui a redéfini la façon d’habiter la ville. Comprenant 354 unités de béton interconnectées, il propose 158 appartements qui comptent tous une terrasse privée. Reconnu comme un des plus beaux exemples de brutalisme dans le monde, Habitat 67 offre des vues panoramiques sur le fleuve Saint-Laurent. Connu à l’international, le projet a été inclus dans la compilation d’Architectural Digest des plus belles constructions brutalistes. À noter : des visites guidées de l’endroit sont offertes.
Cité-du-Havre, 2600, avenue Pierre-Dupuy
Le Stade olympique
Construction iconique qui définit la ville s’il en est une, le Stade olympique a été dessiné par l’architecte français Roger Taillibert comme pièce maîtresse des Jeux olympiques d’été de 1976. Plusieurs le considèrent comme un exemple probant de l’architecture brutaliste, même si son design dévie des formes rigides et angulaires associées au mouvement. Le stade inclut un grand mât incliné (le plus haut du genre dans le monde), ajoutant ainsi une qualité sculpturale au bâtiment qui se démarque par ses matériaux bruts et ses courbes futuristes.
4545, avenue Pierre-de-Coubertin
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Centre-ville et pavillons universitaires
L’architecture brutaliste s’est fait un nid tout à fait naturel au centre-ville de Montréal et sur les campus universitaires, où durabilité, fonctionnalité et matériaux à bons coûts représentent le nerf de la guerre. Les formes rigides et le béton ont permis de donner un sentiment de permanence et de stabilité, alors que l’approche modulaire et simple a légué des designs pratiques pouvant s’adapter à des populations grandissantes.
Au-delà de la fonctionnalité, l’esthétique audacieuse et sculpturale a offert aux campus une identité visuelle unique, renforçant l’idée que les universités et autres lieux multidisciplinaires sont des centres intellectuels ayant une place toute spéciale dans la structure sociale.
Université McGill
Le campus de l’Université McGill abrite de nombreux exemples de brutalisme, de son style et de sa vision unique et pragmatique. La bibliothèque McLennan est au carrefour de la vie académique et sa façade imposante est à l’image de la philosophie brutaliste. Le pavillon Burnside, un bâtiment de 14 étages construit par la Faculté des sciences en 1970, se démarque par ses formes et sa géométrie rigides. Enfin, le bâtiment Stephen Leacock exemplifie l’approche simple du brutalisme, priorisant la fonctionnalité avant l’ornementation.
805, rue Sherbrooke Ouest
Université du Québec à Montréal (UQAM)
L’UQAM propose des exemples indubitablement brutalistes qui reflètent l’importance à l’époque de sa construction des matériaux et des formes bruts. Le pavillon Judith-Jasmin affiche un design résolument angulaire, à l’image du style architectural. Juste à côté, le pavillon Hubert-Aquin renforce le sens du pragmatisme brutaliste grâce à ses constructions de béton et à un accent mis sur la fonctionnalité.
405, rue Sainte-Catherine Est
Place Bonaventure
La Place Bonaventure est l’une des constructions brutalistes les plus ambitieuses de Montréal. Ce complexe multifonctionnel gigantesque affiche du béton brut et une échelle hors norme liés au style architectural. Initialement construit comme plaque tournante du commerce et de l’événementiel, le lieu abrite des halls d’exposition, des bureaux et un hôtel parmi ses murs aux allures de forteresse. Érigé pendant une période particulièrement faste en matière d’urbanisation, son design fait écho aux visées monumentales et fonctionnelles de l’architecture de l’époque. L’idée était de pouvoir accueillir des foules tout en proposant un effet visuel imposant.
800, rue de La Gauchetière Ouest
Complexe Desjardins
Dessiné par l’architecte Jean-Claude La Haye et complété pendant les années 1970, le Complexe Desjardins est un lieu multifonctionnel qui affiche un design brutaliste à hauteur de ville. Il intègre des bureaux, une galerie commerciale et un hôtel dans son cadre de béton grandiose. Sa façade imposante et son agencement géométrique brut reflètent bien l’époque à laquelle le Complexe Desjardins a été construit. Cela dit, son atrium offre ouverture et lumière pour équilibrer la lourdeur des matériaux.
150, rue Sainte-Catherine Ouest
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Un brutalisme des plus accueillants
Si le brutalisme est souvent associé à des bâtiments institutionnels et municipaux, ses principes ont aussi trouvé une niche dans l’industrie de l’accueil. Les hôtels qui sont construits selon ce style mettent l’accent sur la durabilité, l’efficacité et l’intégration urbaine, ce qui fait qu’ils s’intègrent bien au tissu social du centre-ville. Non seulement ces établissements hôteliers affichent une identité moderne, mais leur fonctionnalité priorise le confort malgré leur cadre architectural rigide.
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Hôtel Le Germain Montréal
Apportant une touche raffinée au brutalisme, l’Hôtel Le Germain inclut des éléments de béton à des touches chaleureuses et modernes, créant ainsi une atmosphère invitante. Les formes géométriques de l’établissement et ses matériaux industriels reflètent l’honnêteté structurelle du style architectural, alors que ses intérieurs adoucissent ses traits grâce à des détails savamment pensés. Installé au cœur du centre-ville et affichant sur sa façade une murale colorée, l’endroit démontre que le brutalisme peut être adapté au goût du jour pour en faire un lieu d’accueil luxueux et confortable.
2050, rue Mansfield
Hôtel Bonaventure Montréal
Niché au-dessus de la Place Bonaventure, l’hôtel du même nom permet au béton et à la fonctionnalité du style brutaliste d’offrir une retraite unique. Sa façade minimaliste et ses formes rigides font écho au pragmatisme de l’époque, mais à l’intérieur, ses espaces misent sur les contrastes : un jardin luxuriant sur le toit et une piscine chauffée permettent une expérience sereine malgré l’imposante structure. En combinant durabilité et éléments de loisir, l’hôtel réinterprète le brutalisme pour offrir un lieu où s’évader en pleine ville.
900, rue de La Gauchetière Ouest
Des constructions comme celles susmentionnées racontent l’histoire de Montréal et son mariage avec l’architecture brutaliste de même que le désir de la métropole de se démarquer sur le plan du design. Ces formes de béton brut ont permis à Montréal de solidifier sa réputation en tant que force créative, ce qui lui a d’ailleurs valu le titre de Ville UNESCO de design en 2006. Entre complexes résidentiels d’avant-garde et infrastructures urbaines d’envergure, le brutalisme demeure une partie intégrante de la ville et de son identité visuelle.
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JP Karwacki
JP Karwacki est un rédacteur et journaliste montréalais dont les textes sont parus notamment dans le Time Magazine, le Montreal Gazette, le National Post, le Time Out et le NUVO Magazine. Installé à Montréal depuis plus de 15 ans, il se fait un plaisir de diffuser les nouvelles au sujet des bonnes choses à voir, à manger et à boire en ville. Mi-raconteur, mi-flâneur (avec des traits de boulevardier), cet ancien employé de la restauration passait ses temps libres à penser aux restaurants et aux bars et à lire et à écrire à leur sujet.